Aujourd'hui était censé être une journée comme les autres. Et par là j'entends bien sur un calme olympien du côté amoureux et même amical. D'ailleurs, je ne vois pas comment ça aurait pu en être autrement du côté amoureux, du fait que ma vie sentimentale est comparable au désert du Sahara. Pas la moindre petite bosse, pas le moindre petit écart. J'exagère légèrement en parlant d'écart et de bosse, parce que ces temps-ci, ce n'est pas aussi simple qu'auparavant. Il y a Lucas et tant d'autres facteurs qui font que ma vie sentimentale n'est plus ce qu'elle était. C'est en cela qu'aujourd'hui allait être différent des autres jours...

Nous sommes samedi et j'ai terminé tous mes devoirs. Mon père est sorti s'amuser avec ses amis à moins que cela ne soit avec une de ses amies, mais finalement, ça ne change rien au fit qu'il est sorti. Et à cause de ça, je me retrouve seule dans la maison, à trop penser à des choses qui devraient être simples. Je déteste être dans cette position, penser à tout et à rien sans en trouver la solution. Et c'est pour ça que j'ai décidé de sortir moi aussi. J'ai appelé ma sœur pour savoir si on pouvait prendre un café ensemble, mais elle n'était pas disponible à ce moment là. M vil donc seule, à chercher un endroit dans lequel aller me balader. J'ai opté pour la forêt. Ce lieu paisible et frais, à défaut de me faire penser à autre chose, m'aidera à me relaxer et à au moins sortir de la maison. Je pris mon portable avec moi, on ne sait jamais ce qu'il peut arriver dans les bois... Je rigole. Enfin pas tant que ça. J'ai l'habitude de me balader dans les bois, depuis toute petite j'ai pris l'habitude de faire au moins une heure de marche à chaque fois que je le pouvais. Enfin, je marche une heure seulement depuis mes treize ans mais ça n'a pas grande importance.
Il me fallut une demi heure pour atteindre la forêt et un quart d'heure pour tomber sur lui. Lui, le seul l'unique. Celui pour qui je n'arrive pas à savoir ce que je ressens réellement. D'un côté il m'exaspère et m'énerve franchement et de l'autre, je ne sais pas... Et ce « je ne sais pas » m'énerve plus qu'autre chose. J'ai toujours été douée pour cerner les gens et mes sentiments sont toujours très clairs vis-à-vis d'eux. Jusqu'à aujourd'hui, ils l'étaient. Avec ce qu'il se passe avec Lucas et maintenant lui... Ryan Eastwood. Il est à McKinley et hormis le fait que nos deux lycées ne peuvent pas se voir en peinture, il y a ce petit quelque chose en lui qui fait que je n'arrive pas à statuer sur son sort, ou plutôt sur ce qui se passe réellement entre nous. De toute manière, ça n'a pas de réelle importance ou en tout cas pas maintenant, du fait qu'on passe la plupart de notre temps à se chamailler. Et je doute qu'aujourd'hui fasse exception à la règle... Je ne comptais d'ailleurs pas lui adresser la parole mais je n'eus pas le choix. Ou plutôt, quelque chose en moi me poussa à entamer la discussion. C'est alors plus arrogante qu'autre chose, que je commence par dire :

« Monsieur Eastwood concède à accorder un peu de son temps à la nature. Les miracles existent finalement. »

J'étais arrogante et je détestais ça. Ça ne me ressemblait pas du tout. Ce n'est pas mon genre d'attaquer les gens sans raisons. Je crois que ce qui m'exaspère le plus chez lui, c'est que je n'arrive vraiment pas à le cerner et ça se traduit par cette agressivité sans fondement. Il y a peut-être même plus que cela, mais je préfère ne pas en parler ni même me l'avouer. Je ne voulais d'ailleurs rien ajouter, j'en n'avais bien trop déjà dit. J'attendais sa réponse aussi impatiemment que pas du tout...

Une journée qui s’avérait inintéressante venait de se transformer en une journée qui avait son potentiel … Comment ? Par sa seule présence … Je ne pensais pas la rencontrer ici, mais ce fus le cas, et je comptais bien l’ignorer mais elle ne m’en laissa pas le choix … Je la voyais s’approcher de moi, avec cet air supérieur que je détestais voir chez les gens et encore plus chez elle. Je détestais vraiment cette fille, je ne savais pas pourquoi, mais dès le premier jour je ne m’étais pas bien entendu avec elle, et le fait qu’elle soit à Kennedy aggravait encore plus les choses. Elle et moi, nous n’étions pas destinés à nous entendre et moins je la voyais, mieux que je portais. Mais aujourd’hui, j’eus le malheur –enfin je crois, de la rencontrer dans ce coin de la forêt qui m’était familier. Familier dans le sens où c’était à cet endroit que je venais souvent pour me changer les idées, respirer un bon air frais. Ce n’était pas vraiment loin de chez moi, donc dès que j’avais besoin de prendre l’air, d’être un peu seul, j’allais me promener dans les bois, regarder autour de moi, profiter de ce que le moment présent me donnait … Et aujourd’hui, il me donnait, la chance ou le malheur, de rencontrer Trycia. Je la regardais de haut en bas alors qu’elle avançait vers moi, je fronçais les sourcils en l’entendant, bien sûr, elle ne disait que des choses fausses, bien sûr que j’aimais la nature, au moins un minimum … Mais je laissais couler, parce qu’aujourd’hui, je ne voulais pas me prendre la tête avec une personne qui n’en valait pas le coup … A vrai dire, depuis que j’avais connaissance de son existence, je n’avais pas arrêté de me chamailler avec elle, c’était comme devenu une routine, une routine qui me fatiguée à force mais je ne comptais pas baisser les bras, du moins, ce n’était pas ce que je voulais … Je reculais de quelques pas alors qu’elle s’était dirigée vers elle, je lui tournais le dos et regardais autour de moi, je regardais les arbres, les mauvaises herbes, les bouts de branches au sol, je fis quelques pas en avant afin d’agrandir la distance qui nous séparait … C’était plus fort que moi, j’avais besoin qu’il y ait un minimum de distance entre elle et moi, je ne sais pas pourquoi, mais c’était obligatoire, je ne pouvais pas être proche d’elle, parce qu’elle avait cet effet sur moi que je n’appréciais pas … Notre relation, enfin, ce qui se passait entre nous avait quelque chose de bizarre et aussi un côté attractif, tellement attractif que je ne pouvais pas m’empêcher de parfois penser à elle … Et je m’en voulais, je m’en voulais parce qu’elle n’était pas ma petite amie, et qu’elle ne le sera jamais. J’aimais vraiment Alison mais Trycia avait ce petit quelque chose de nouveau qui me hanter les pensées et que je ne trouvais pas chez Alison … Et je ne savais pas quoi en penser … Et d’un côté ça me faisait peur, peur parce que de toute manière, je ne pouvais pas ressentir des sentiments pour cette fille qui était comme Satan … D’accord, utiliser le terme de ‘Satan’ était un peu trop exagéré, mais c’est ce que je ressentais envers elle, enfin, c’était plutôt mitigé … Mais je ne pouvais pas ressentir le moindre sentiment d’amitié voire d’attirance … Non je ne pouvais pas … Et c’est pourquoi je me montrais à la fois distant et désagréable avec elle mais je ne pouvais tout de même pas m’empêcher de ressentir le besoin de savoir ce qu’il y avait entre elle et moi …

« Et mademoiselle Hastings n’a pas peur de salir ses belles chaussures à ce que je vois. »

J’esquissais un sourire forcé puis lui tournais le dos et recommençais à regarder autour de moi, j’avais été sec, distant, mais pas méchant … Du moins, c’était ce que j’avais recherché à être, parce que, même si avec elle je l’étais, méchant, en réalité, je ne l’étais pas, j’adorais passer des moments dans cette forêt, là où il n’y a que ça de vrai … Mais le fait qu’elle soit là, gâcher un peu tout … J’avançais un peu et aller m’asseoir sur un rocher, ce qui fit que je me retrouvais en face d’elle. Je la regardais discrètement, c’était affreux comme je ne pouvais pas m’empêcher de la regarder dans les moindres détails … Et je baissais la tête après l’avoir regardé, mais qu’est-ce qu’il m’arrivé ? Pourquoi agissais-je ainsi ? Je prenais le mauvais chemin en ce moment-même … Passer du temps avec Trycia, même si ce n’était pas volontaire, ce n’était pas bon pour moi, pour ma relation avec Alison … Mais, au fond, je ressentais ce sentiment étrange de bien-être, oui, au fond, j’étais content que ça soit Trycia et pas une autre qui soit en ce moment même dans la forêt avec moi. Je soupirais et reposais mes yeux sur Trycia en soupirant.

« Ecoutes, je suis pas vraiment d’humeur à me prendre la tête avec toi. Donc, si tu pouvais juste tracer ta route … »

Tracer sa route, si elle avait fait dès le début, ça aurait été beaucoup plus simple, mais elle ne l’avait pas fait, elle avait préféré me provoquer, me lancer un pique auquel j’avais répondu … Mais maintenant, lui demander de tracer sa route, me faisait ressentir comme une légère douleur dans la poitrine. Je ne pouvais pas vraiment l’expliquer … Mais maintenant qu’elle était là, je n’avais pas envie qu’elle s’en aille. Cette fille m’intriguait, et elle m’intriguerait encore longtemps si je ne prenais pas le temps de discuter avec elle, d'en savoir un peu plus, aujourd’hui, on en avait l’occasion mais au lieu de lui proposer de discuter, de découvrir pourquoi elle m'intriguait tant, je lui avais demandé de partir, de me laisser tranquille alors que ce n’était évidemment pas ce que je voulais … Et j’avais ce petit espoir qu’elle réplique et qu’elle reste auprès de moi … Après tout, peut-être que sa compagnie n’était pas si horrible que ça …

Je déteste avoir à le dire mais je ne me sens pas à mon aise lorsque Ryan est là. Je ne saurais l'expliquer par des mots mais je n'arrive pas à être moi-même lorsqu'il est dans les parages. C'est vrai, à chaque fois que je le croise et qu'on entame une discussion, bien que ce ne soient pas des discussions à proprement parlé, et bien je me retrouve dans la peau d'une autre personne. C'est difficile à expliquer... D'ordinaire, je suis bien loin de la fille qui cherche à répliquer des choses méchantes ou sans fondements comme ce que je fais avec Ryan. Je suis une fille calme et réfléchie, ou tout du moins j'essaye de l'être, mais avec lui c'est différent. C'est comme si il y avait une partie de moi que je ne connaissais pas ou que je refoulais inconsciemment. Et je déteste ça. C'est peut-être pour ça que je le déteste aussi. Même si finalement, je ne le déteste pas, ce sont nos rapports que je déteste. Comment puis-je être gentille et sensible avec certaines personnes alors que je n'arrive pas à l'être avec lui ? Dès notre première rencontre, le ton était donné. Nous n'avons jamais eu de réelle conversation, comme de véritables personnes qui parlent sans se chercher mutuellement. Et c'est ce que je n'arrive pas à m'expliquer. J'espère qu'un jour, ça s'arrangera même si je ne suis pas prête à faire le premier pas dans ce sens. Même si je déteste ce qui se passe entre nous, je ne peux nier que cette partie de moi refoulée qui refait surface à chaque fois que je le croise, aime ça finalement. Et le voir aujourd'hui, dans cette forêt, c'est étrange. Étrange dans le sens où il est vraiment la dernière personne à laquelle je m'attendais, la dernière personne que je m'attendais à croiser ici. C'est déjà assez étrange en temps normal, lorsqu'on se croise dans des endroits publics, bondés de monde, mais ici... Toujours est-il que lorsqu'il répondit à ma première réplique, je ne pus m'empêcher de grimacer. Il ne sait rien de moi et il se permet de faire des sous-entendus complètement déplacés. Mais je ne peux pas lui en vouloir, je fais exactement pareil et c'est bien impossible qu'on apprenne à se connaître du fait de la complexité de nos rapports. Toujours est-il que je ne pouvais pas ne pas répliquer. C'est pourquoi il eut droit à :

« Pour ton information personnelle, sache qu'aucune de mes chaussures n'a peur de sa salir, et c'est aussi mon cas. »

Je ne sais pas pourquoi j'éprouvais le besoin de me justifier de la sorte, mais je l'ai fait. La nature et moi, c'est une grande histoire d'amour. Lorsque j'ai déménagé avec mon père et que je ne lui parlais pas encore, elle était mon seul refuge, ma seule amie. Mais ça, Ryan s'en fiche et là encore, je ne peux pas lui en vouloir. En revanche, ce qu'il dit par la suite me surpris. Jamais depuis qu'on se connait, il ne m'a dit une telle chose. Il n'est pas d'humeur à se chamailler, qui l'est finalement ? Et pour une fois, j'étais d'accord avec lui. Si j'étais venue me balader ici, c'était pour me retrouver au calme, pour ne pas avoir à ruminer mes problèmes, et qu'est-ce que je faisais, j'en créais de nouveaux en lui parlant. Là encore, ça ne me ressemble pas. Je déteste les problèmes et je préfère de loin les fuir plutôt que de les créer. C'est pourtant ce que je fais à chaque fois que je tombe sur lui. Rien qu'en lui parlant, je cherche la bagarre. Enfin peut-être pas la bagarre, mais le fait de se chamailler de la sorte ne nous apporte rien de bien, ni à l'un ni à l'autre. Alors c'est tout de même surprise que je répond à sa demande :

« Très bien, je vais tracer ma route... »

Si j'avais été d'humeur à le chercher, je lui aurais surement rétorquer un truc du genre : « Mais la forêt est à tout le monde mon cher, tu n'as qu'à toi-même la tracer ta route » ou encore « Oh quel dommage, moi qui adore ta compagnie... » Mais non, au lieu de ça, j'ai préféré abonder dans son sens. Même si auparavant, il faisait tout pour mettre de la distance entre nous alors que je n'avais pas bouger d'un cheveu depuis. C'est alors que je pris de la distance à mon tour, en traçant mon chemin comme il l'avait demandé. Mais je ressentis quelque chose d'étrange en moi. Je n'avais pas envie de partir. C'est pourtant ce que j'étais venue chercher, du calme; de la sérénité, de la paix. Mais non, maintenant que je m'éloignais de lui, j'éprouvais le besoin de me retourner pour le contempler une dernière fois. Mais que m'arrivait-il ? Je déteste avoir à le dire, mais je ne voulais pas cesser de me chamailler avec lui. Mon côté mauvaise fille refaisait surface et ça ne révélait rien de bon. Je n'étais pas encore à dix pas de lui que je me retourne pour rétorquer une fois encore :

« Pourquoi es-tu comme ça avec moi ? Enfin, je veux dire... Pourquoi sommes-nous comme ça l'un envers l'autre ? »

Ça pouvait paraître stupide comme interrogation mais c'était surement le meilleur endroit pour la poser. Nous ne sommes que tous les deux, personne aux alentour et c'est le moment ou jamais de mettre les points sur les i. Finalement, je réussis tout de même à être « moi » avec lui. Une fois n'est pas coutume. Maintenant, voudra-t-il me répondre sincèrement ? Connait-il la réponse ? Si il est dans le même cas que moi, je doute qu'on arrive à quelque chose de constructible...

Je ne bronchais pas à ses réponses, tout ce que je voulais, c’est qu’elle s’en aille, être au moins tranquille, parce que c’était ce dont j’avais besoin … Un peu de tranquillité, et je savais qu’auprès d’elle, ce n’est pas ce que je trouverai, non puisqu’à chaque fois qu’on était réunit, on devait se chamailler, s’envoyer des piques, se sauter l’un sur l’autre –pas au premier sens bien sûr, c’était tout le contraire même … On était loin de se sauter dessus littéralement, c’était même une pensée qui me faisait horreur … Je fronçais d’ailleurs les sourcils rien qu’en y pensant, ça paraissait tellement faux … Tellement pas naturel, non, je ne me voyais pas avec elle, alors pourquoi sentais-je ce besoin de tout faire pour qu’elle me remarque quand elle n’était pas très loin de moi, pourquoi en ce moment-même je voulais qu’elle reste avec moi ? Je secouais la tête légèrement et regardais les pieds, c’était une mauvaise idée d’être allé dans la forêt, une mauvaise idée de penser qu’elle devait rester … Je respirais doucement, regarder tout sauf elle parce que je savais que si je la regardais, il allait se passer quelque chose, quelque chose que je redoutais depuis très longtemps, quelque chose que je redoutais en fait depuis la première fois qu’on s’était vus … Je détestais me sentir autant vulnérable, elle n’avait pas le droit de venir dans ma vie et de la changer, j’étais bien avec Alison, j’étais heureux, je l’aimais, certes, elle n’était pas l’amour de ma vie, mais je savais qu’à force, elle le deviendrait, il faut du temps pour cultiver un amour, et il m’en faut pour cultiver le mien pour elle. J’ai très longtemps pensé que l’amour n’était qu’une blague pour petites filles pour leurs donner une raison de ne pas baisser les bras et j’avais raison de penser ça, surtout quand je voyais mon père se défouler sur ma mère, sur ma sœur ou encore sur moi. L’amour, ça n’existe pas, ce n’est qu’une pure invention, j’ai toujours pensé ça … Jusqu’à ce que je rencontre Alison, qu’elle ait ce changement en moi, dans ma vie, qu’elle me monte que l’amour c’est quelque chose de vrai … Je dois beaucoup Alison et la dernière chose que je lui dois, c’est sûrement l’infidélité … Et c’est pourtant ce qui pourrait se passer si je continuais à prêter attention à cette fille, cette fille qui commençait de plus en plus à hanter mes pensées … Je savais que le mieux à faire, c’était qu’elle s’en aille, qu’elle parte loin de moi … Mais ce n’était pas ce que je voulais, alors que je l’entendis me dire qu’elle allait tracer sa route, j’eus un léger pincement au cœur qui paraissait tellement faux, je ne devais pas ressentir ça pour cette fille, non parce qu’elle ne représentait rien à mes yeux, elle était rien et ça restera ainsi. Au lieu de me sentir soulageais qu’elle parte, je me sentais triste, je ne la connaissais pas, elle ne me connaissait pas et pourtant, c’était comme si j’avais besoin qu’elle reste. J’étais complètement perdu, je passais mes mains sur mon visage en soupirant puis relevais ma tête vers elle en entendant sa question. Question à laquelle je n’avais pas de réponse, ce qui expliquait mon silence. Je ne savais pas quoi répondre, je ne savais pas pourquoi j’agissais comme ça lorsqu’elle était dans les alentours et il était hors de question que je lui avoue tout ce qui se passait dans ma tête depuis quelques temps …

« T’es de Kennedy et certes Alison l’est aussi mais elle est la seule exception parce que je l’aime »

Je la regardais, pas dans les yeux, et je restais à ma place, l’explication que je venais de donner n’avait pas vraiment de sens, et si elle acceptait cette phrase comme réponse c’était qu’elle était vraiment très naïve, encore plus que je ne l’aurais cru. Je soupirais, Alison, Alison, il fallait que je me remette dans l’esprit que j’étais avec Alison et que j’étais heureux. Alors pourquoi Trycia avait cet effet-ci sur moi ? Je secouais la tête légèrement et la regardais intrigué.

« On devrait pas traîner ensemble toi et moi … »

Je hochais la tête légèrement et restais à ma place, je faisais tout pour qu’elle parte mais ce n’était pas ce que je voulais, en réalité, j’avais trop peur, trop peur qu’en apprenant à mieux la connaître qu’elle prenne la place d’Alison, j’avais peur de voir que les doutes que j’avais s’avéré justes …

J'aurais dû tracer ma route comme il a su si bien me le dire au début. Mais au lieu de ça, je restais, pour essayer d'avoir des réponses. Réponses complètement stupides du fait qu'on n'a jamais réellement su se parler comme deux personnes responsables. Je pense qu'au fond de moi, j'espérais vraiment qu'on puisse le faire un jour et la véritable question est certainement : pourquoi ? Pourquoi est-ce que je souhaite tellement qu'on puisse se parler comme deux personnes sont censées le faire ? C'est si insensé que je n'en trouve pas la réponse moi même. En face de n'importe qui d'autre, je suis capable d'être gentille et attentionnée mais pas lorsqu'il s'agit de lui. Depuis notre première rencontre c'est la même chose. On se rentre dedans sans véritable raison, bien sur cette raison est implicite mais ni l'un ni l'autre n'est capable de la prononcer à haute voix. De mon côté, je ne veux pas y penser, c'est si étrange de se comporter de cette manière envers lui que je ne veux même pas penser à ce que cela signifie réellement. Malgré tout, je restais là, à essayer de trouver des réponses. Et ce n'est certainement pas celle qu'il me donna qui me satisferait. Nos deux lycées se détestent, certes c'est un fait mais ce n'est pas la véritable raison de nos rapports si conflictuels. Il ne voulait pas me répondre sincèrement, tant pis, il est peut-être comme moi à ce sujet, il ne veut certainement pas s'avouer ce qui est en train de se passer entre nous. Il n'y a même pas de nous. Je ne veux même pas imaginer qu'il y en ait un. Si on me posait la question, qu'est-ce que Ryan Eastwood représente pour toi ? Je répondrai sans hésiter : c'est un garçon avec lequel je n'entretiens pas de bons rapports et je préfère ne pas me trouver en travers de son chemin parce que c'est un être détestable et complètement incapable d'entretenir une conversation censée. C'est une définition très fausse et en réalité ce n'est pas du tout ce que je ressens pour lui. Je n'ai jamais réellement détesté quelqu'un au point de dire de pareilles horreurs à son sujet. Sauf peut-être mon père biologique. Mais c'est une autre histoire. Mais jamais je ne serai méchante à tel point de prononcer de de telles paroles. Je suis capable d'être très méchante. Mais il faut que la personne l'est méritée en m'ayant fait souffrir ou en m'ayant fait mal. Ce qui n'est pas le cas de Ryan. Toujours est-il que sa réponse ne me satisfit pas. Et pourquoi me parle-t-il d'Alison, comme ça ? Bien-sûr je sais qu'elle est sa petite amie qu'ils forment un couple, comment ne serais-je pas au courant ? Presque à chaque fois que je le croise lors de rencontres sportives entre nos deux lycées, il est avec elle et à chaque fois, je sens mon rythme cardiaque accélérer de manière anormale. Et je déteste quand ça arrive. Mais je fais comme si il ne se passait rien, parce que je ne veux surtout pas qu'il se passe quelque chose entre lui et moi. C'est une chose complètement impensable et même en rêve, c'est impossible. Malgré tout, je ne pu que répondre à ses histoires de lycées :

« C'est un fait avéré, nos lycées se détestent et alors ? J'ai des amis à McKinley, ces histoires de rivalités ne m'empêchent en rien d'être amie avec des élèves de McKinley. Et Alison n'a rien à voir là-dedans. »

Mais je ne sus quoi ajouter. Et je n'aurais surement pas dû lui parler de mes dits amis de McKinley. Mais peu importe, c'était juste pour lui montrer que je voulais réellement savoir le pourquoi de la chose... Je savais pertinemment pourquoi il me parlait d'Alison. Mais je ne voulais pas qu'il soit dit. Puis il parla de ne pas traîner ensemble et là encore, je ne comprenais que trop bien ce qu'il voulait dire. Mais je fis comme si ce n'était pas le cas ou tout du moins, j'utilisais un moyen détourné pour parler de tout cela.

« Et on ne le fait pas. On en fait que se chamailler à chaque fois qu'on se rencontre. C'est tout ce qu'on fait. »

C'était peut-être naïf de ma part de ne pas vouloir voir la vérité en face mais tant qu'il ne le prononçait pas à haute voix, je ne le ferai pas non plus. D'ailleurs, je vois mal comment deux personnes comme nous qui nous chamaillons à chaque fois qu'on le peut, pourrions trainer ensemble. Même si à cette idée, une partie de moi n'était pas contre. Mais comme d'habitude, je rangeais cette information au plus profond de moi même pour ne plus avoir à y penser. Je ne savais plus quoi faire. C'est bien la première fois que ça m'arrive avec lui. Je ne savais pas si je devais partir ou encore continuer à lui parler. La situation n'est pourtant pas si compliquée que ça, la solution est simple, soit je pars soit il pars, soit on continue à se parler ou à se chamailler comme on a l'habitude de le faire. Toujours est-il que je n'arrivais pas à me décider. D'un côté, je voulais partir, ne plus avoir à me poser des questions à son sujet, et d'un autre côté, j'éprouvais le besoin de rester pour je ne sais quelle raison. Enfin si, la raison je la connaissais mais je ne voulais surtout pas qu'il soit dit. Alors en attente de savoir quoi faire, je restais plantée là en attendant sa réponse.

Je secouais la tête de droite à gauche en soupirant, pourquoi ne voulait-elle pas me laisser tranquille ? Pourquoi n’était-elle pas encore partit ? Et pourquoi est-ce que je ressentais de la joie de voir qu’elle insistait pour qu’on se parler ? Je soupirais et essayait de cacher mes sentiments parce que c’était la seule chose que je savais faire, cacher mes sentiments … Alison m’avait reproché plusieurs fois de ne rien lui dire, de ne pas lui dire ce que je ressentais vraiment, mais en 5 ans, j’avais appris à faire ce qu’il fallait pour cacher tous mes sentiments que ça soit de la joie ou de la peine … Je restais perplexe, neutre à chaque chose qu’on me disait. Je ne laissais pas apparaître mes sentiments mais avec elle, c’était plus difficile qu’avec les autres et je ne savais pas pourquoi … Ca m’énervait tellement de me sentir ainsi, impuissant face à cette situation, situation qui n’avait pas lieu d’être !

« Mes amis sont à McKinley et par malchance je suis tombé amoureux d’Alison qui est à Kennedy. Et je me dispute assez souvent avec elle à cause de ça, donc je n’ai pas besoin d’amis à Kennedy. »

Je tenais à lui dire implicitement qu’il n’y aurait rien entre nous, qu’il y avait Alison et qu’elle sera toujours présente dans ma vie, dans mon cœur. Je tenais à le dire à voix haute, comme pour me le rentrer dans la tête, me rappeler que mon cœur n’était plus libre et que ce qu’il se passait entre elle et moi, n’était que du vent.

« C’est juste qu’Alison est la seule exception que je fais parce que je l’aime. »

Je fermais les yeux, exaspéré par le comportement de Trycia, comportement que je ne comprenais pas du tout, pourquoi d’un seul coup, elle avait voulu creuser un peu plus et savoir la raison pour laquelle elle et moi on se chamailler ? Pourquoi ça lui importait autant ? C’était aussi important que ça de savoir ce qu’il y avait entre nous pour qu’on se chamailler à chaque fois qu’on se voyait ? Je soupirais une nouvelle fois, je détestais parler de mes sentiments et je savais que si elle forçait encore une fois, je n’allais pas tarder à me replier sur moi et à redevenir ce garçon arrogant et méchant qu’elle voyait à chaque fois … Et ce n’était pas ce que je voulais, parce que ce n’était pas ce qu’elle méritait, mais c’était comme ça que j’étais, à chaque fois que je me sentais en danger, j’avais besoin de reprendre le dessus, de devenir méchant … Je ne voulais pas lui montrer ma vulnérabilité, lui montrer qu’elle était source de ma vulnérabilité, que c’était à cause d’elle, à cause de ce qu’il se passait entre nous que j’étais comme ça … Je me levais et m’avançais vers elle, je savais que c’était risqué mais à vrai dire, en ce moment même, je ne réfléchissais plus, et pour la première fois depuis qu’on se connaissait, je me trouvais à quelques centimètres d’elle, je la regardais dans les yeux en secouant légèrement la tête. Cette fille m’intriguait tellement … Je soupirais encore une fois mais restais à ma place, garder mes yeux plongés dans les siens.

« Et toi ? Pourquoi t’es toujours pas partit ? Qu’est-ce qui te retient là ? Avec moi ? »

Je sentais mon cœur battre de plus en plus vite, c’était la première fois que je m’autorisais à être aussi proche d’elle, je pouvais sentir son parfum –qui au passage, sentait extrêmement bon, je pouvais voir si elle avait des tâches de rousseurs, des fossettes, ses yeux couleur bleu … Je savais que ce que je venais de faire était une terrible erreur mais au fond, je m’en fichais, parce qu’il fallait l’avouer, j’étais à l’aise, j’étais bien …

Je ne sais pas réellement ce qui m'a pris ce jour là, de vouloir à tout prix savoir pourquoi entre lui et moi c'est comme ça. C'est une chose que je ne m'explique pas, le fait de rester près de lui alors que j'aurais pu partir depuis longtemps. D'ordinaire je ne suis pas cette fille, la fille qu'il connait ou la fille que je suis quand il est dans les parages. C'est également une chose que je ne m'explique pas, celle-ci peut-être encore moins que le fait de rester près de lui. Et c'est surement une des raisons me poussant à tant vouloir savoir le pourquoi de la chose.
Son explication quant à sa relation avec Alison n'était pas très claire. En surface elle l'était mais si on creusait un peu, pourquoi dit-il par malchance ? Si il est avec elle c'est qu'il l'aime et point. Je ne vois pas pourquoi il utiliserait ce terme si tout allait bien. Enfin bon, c'est surement une erreur de ma part de penser comme ça. J'ai souvent tendance à tirer des conclusions hâtivement. Alors je ne répondis rien à cela. Après tout, moi non plus je n'ai pas besoin d'amis à McKinley alors que je suis à Kennedy. Mais l'amitié c'est comme l'amour, ça ne se commande pas. Et il y a des jours où j'aimerais tuer celui ou celle qui a mis en route toutes ces histoires de rivalités entre nos deux lycées. Après tout, nous lycéens du moment n'y sommes pour rien si nous nous détestons. Si tout allait bien, McKinley serait ami avec Kennedy et toutes ces histoires de haine et de tout le reste disparaitraient. Mais nous devons subir ce que nos ancêtres ont mis en place. Je dois bien avouer que j'en joue lorsqu'il s'agit de Ryan, mais ce n'est pas pour autant que je cautionne la chose. Toujours est-il que lorsqu'il répondit qu'Alison était la seule exception parce qu'il l'aime, il y a quelque chose dans son discours qui n'est pas réel. J'ai bien senti que si il prononçait ces mots, surtout les trois derniers, c'est parce qu'il a besoin de s'en convaincre. L'amour peut-être compliqué, je le conçois tout à fait et je sais parfaitement ce que c'est étant tributaire de certains sentiments compliqués, auxquels je ne donne pas encore de sens. Et là je veux parler de Lucas et ce qui se passe avec Ryan n'est pas non plus lié au hasard. Il y a forcément quelque chose d'implicite entre nous pour que nos rapports soient si conflictuels. Et c'est ça que je ne comprend pas. J'ai toujours dit qu'il fallait des raisons précises pour détester une personne, qu'elle ai fait du mal pour quelque chose de grave, et c'est tout le contraire de ce qui se passe avec Ryan. Je veux dire qu'il ne m'a pas fait de mal et la réciproque est tout aussi valable. Et je déteste ne pas pouvoir mettre réellement de mots sur ce qui nous lie. Je sais parfaitement que c'est un sentiment que je ne veux surtout pas ressentir, connaissant Alison, je ne veux surtout pas ressentir quoi que ce soit pour son petit ami. Alors lorsqu'il demanda ce qui me retenait auprès de lui, je ne lui répondis pas tout de suite. Je ne sus que lui dire, et surtout comment lui dire. Finalement, ça se retournait contre moi, je lui avais posé la question et il me la retournait ce qui semble logique. En plus, il n'arrêtait pas de me fixer, il me regardait dans les yeux et je n'ai jamais su regarder les personnes dans les yeux, quelles qu'elles soient. Mais là, j'arrivais à soutenir son regard je ne sais parfaitement par quel miracle. De plus, il s'était rapproché de moi, si près que jamais nous ne l'avions été, c'était à la fois exaltant et étrange. Mon cœur battait anormalement malgré ça, je me suis éloignée de lui. Cette proximité entre nous deux me dérangeais. Je ne saurais dire pourquoi mais il fallait que je m'éloigne. Pourtant ce n'était pas pour me déplaire, loin de là, mais mon bon sens a pris le dessus et je me suis éloignée de quelques pas. Puis je finis enfin par lui répondre :

« C'est ce que j'essaye de comprendre... »

Pour la première fois de ma vie depuis que je le connais, j'ai été honnête avec lui. Je ne sais d'ailleurs pas pourquoi maintenant, peut-être le fait que nous ayons été si proches pendant quelques secondes ou alors le fait que je souhaite réellement mettre des mots sur tout ça. Comme je ne pouvais pas ne plus rien dire après cela, j'ajoutai en prenant un ton que je voulais dégagé mais qui finalement, ne l'était pas du tout :

« Tu aurais pu partir toi aussi. Mais tu es toujours là. »

Quel sens de la déduction inné. Et bien si ma grand mère était là, elle répliquerait que j'irai loin avec des déductions de ce genre, bien sur sur le ton de l'ironie. Chez les Hastings, nous sommes très forts dans ce domaine. Toujours est-il que je ne lui avais toujours pas donné de réponse, alors prenant mon courage à deux mains, je prend la parole une dernière fois :

« Même si j'adore me chamailler avec toi, j'aimerais bien savoir pourquoi on le fait. Les gens ne se chamaillent jamais sans raison. Alors qu'elle est notre raison à nous ? Et si je suis encore là, c'est parce que j'attends la réponse à cette question. J'aimerais sincèrement savoir le pourquoi nous fonctionnons de cette manière. »

Ça à l'air idiot comme ça, mais au fond, je n'en menais pas large. J'avais quelque peu peur de sa réponse. J'étais bien incapable de lui donner une réponse valable mais c'est ce que je lui demandais de faire. Malgré tout, je n'avais pas du tout envie de le partir, car si partir signifiait le quitter, c'était une chose que je ne voulais absolument pas faire. Et c'est surement la réponse qu'il attendait mais que je ne lui donnerai jamais, ou tout du moins pas comme ça...

Tout le long où nous étions plus qu'à quelques centimètres l'un de l'autre, je la regardais dans les yeux, j'avais plongé mes yeux dans les siens et je savais que rien ne pouvait nous déranger ... Même pas Alison ... Pendant un court instant, j'avais cessé de penser à ma petite amie, j'avais oublié que j'étais en couple et heureux, c'est comme si je m'étais senti attiré vers Trycia ... Attiré d'une manière que je n'aimais pas du tout. Qui était-elle pour que j'agisse ainsi ? Et en plus dans le dos de ma petite amie ? Je fronçais les sourcils et la laissais reculé de quelques pas, apparemment, ce rapprochement soudain entre elle et moi la déstabilisée et je ne pouvais pas lui en vouloir, non, puisqu'à moi aussi ça me faisait la même chose, être aussi proche d'elle m'avait déstabilisé, au point de ne plus savoir où j'étais ... Je baissais la tête quelques instants, légèrement gêné par cette situation, je ne savais pas ce qu'il m'avait pris, pourquoi est-ce que je m'étais levé et que je m'étais approché d'aussi près d'elle ? Je me sentais honteux quand même, c'était comme si j'avais trompé Alison, même s'il ne s'était rien passé, je dois avoué avoir pensé à ça, à ce qu'il pourrait se passer entre elle et moi à cet instant précis, dans cet endroit où nous étions qu'elle et moi, où nous étions sûr de ne pas être surpris ... Et j'avoue que l'idée de pouvoir sentir sa peau contre la mienne, même ses lèvres contre les miennes, ça me faisait drôle, parce que ça sonnait mal mais d'un côté, ça ne l'était pas ... Mais je savais qu'il ne se passerait rien, il devait ne rien se passer entre elle et moi, parce que je n'étais pas ce genre de type à aller voir ailleurs dans le dos de sa copine ...

« Je vais partir ... C'est ce qu'il y a de mieux à faire ... »

Disais-je la tête toujours baissé alors qu'elle venait de me faire remarquer que moi aussi je n'étais pas partit et que j'en avais le choix, c'est vrai, elle avait raison, j'aurais pu partir, et ça depuis le début, mais il y avait ce quelque chose qui me bloqué ici ... Et ne pas savoir vraiment de quoi il s'agissait me tracasser ... Mais je devais me faire à l'idée que je ne saurais jamais vraiment ... Ni elle ni moi ne voulions le dire à voix haute, dire à voix haute qu'il se passait réellement un truc entre nous ... Je savais pourquoi je ne voulais pas le dire, parce que je ne pouvais pas, je n'en n'avais pas le droit, vis-à-vis d'Alison, j'étais en couple, j'aimais ma petite amie et pourtant, je n'arrêtais pas de penser à Trycia depuis quelques temps ... Mais elle, qu'est-ce qui l'empêcher de le dire ? Je relevais ma tête vers elle, pour la regarder encore une dernière fois ...

« Tu ... Tu sais très bien pourquoi on est comme ça ... Et je l'avouerai jamais parce que .... Alison est ma petite amie et je l'aime. »

Je me demandais bien comment cette sortie en forêt allait se terminer. Je n'ose pas imaginer ce qu'il pourrait se passer entre lui et moi. Alison et moi sommes de bonnes amies et je ne suis vraiment pas le genre de filles à trahir une amie quelle qu'elle soit. Alison ne le mérite pas. Alors lorsque Ryan répondit qu'il allait partir, j'ai senti comme un soulagement au creux de ma poitrine, même si je n'avais pas plus envie que tout à l'heure qu'il s'en aille. Mais il le dit lui-même, c'est ce qu'il y a de mieux à faire. Et même si je meurs d'envie que tout soit clair entre nous, une bonne fois pour toute, je ne peux me résoudre de le faire en faisant du mal à Alison. Alors je me contentais de hocher la tête lorsqu'il dit qu'il allait partir. Je ne pouvais pas le retenir plus longtemps tout en sachant que rien de bon n'allait sortir de cette rencontre... Mais avant de partir, il ajouta quelque chose qui me surpris. Je ne pensais pas qu'il allait entrer dans le vif du sujet de cette manière. Jusqu'à présent, il s'est contenté de citer Alison, en précisant bien qu'il est amoureux d'elle et qu'elle est sa petite amie. Mais à cet instant présent, il avoua que quelque chose de réel se passait entre nous. Ça me surpris quelque peu et je ne pus m'empêcher d'ouvrir rapidement la bouche de surprise, pour immédiatement la refermer. Et je ne pouvais pas lui dire qu'il avait tort. Même sans Alison, il reste Lucas, et même si je ne sais pas très bien comment faire face à la situation maintenant, je ne dois pas compliquer les choses avec Ryan entre temps. Bien que je n'ai jamais eu l'intention de le faire. Tout du moins pas consciemment. Je voulais juste connaître la vérité, même si elle est implicite et complètement impossible à intégrer. Alors à ses paroles, j'ai juste répondu :

« D'accord... »

Deux mots simples même si difficiles à prononcer du fait que jamais, l'un comme l'autre, nous ne prononcerons les mots qu'il faut. Je m'éloigne un peu plus de lui comme pour lui intimer de partir tant qu'il en est encore temps, puis j'ajoute :

« Je vais y aller aussi... »

Je n'avais pas envie de partir mais il le fallait pourtant bien. De plus, c'était bien la première fois que Ryan et moi ne nous disputions pas. Pour la première fois de toute notre vie, nous avons réussi à aligner deux mots corrects sans qu'ils aient un but destructeur. C'était un grand pas en avant pour ne pas dire un miracle. Je doute que cela se reproduise de si tôt. C'est une des raisons qui me bloquaient sur place, m'empêchant de partir. Malgré ça, il fallait tout de même prendre nos responsabilités et partir avant que l'un de nous dérape. Mais je ne voulais tout de même pas le quitter sur ces paroles. Ce sont les plus gentilles que j'ai eu à son égard, malgré tout, je ne pouvais concéder que cette sortie ne se termine de la sorte. Alors j'ajoutai :

« Salut Alison de ma part. »

Même si je sais qu'il ne fera pas. Car si il le fait, Alison pourrait se poser des questions sur Ryan et moi. Elle sait pertinemment quelle est notre manière d'agir lorsqu'on se rencontre lui et moi et elle trouverait étrange que d'un seul coup, tout se soit arranger comme par magie. Mais si je lui avais dit ça, c'était comme pour lui dire que j'étais d'accord avec le fait qu'il ne veuille rien dire à haute voix. Que je comprend la situation face à Alison. Après cela, j'ai donc commencé à faire un pas...

J'étais soulagé qu'elle me laisse partir ainsi, qu'elle ne me retienne pas ici, avec elle, parce que Dieu savait ce qui pouvait se passer entre elle et moi, je pense que j'avais passé assez de temps avec elle ainsi ... Je fis quelques pas en arrière alors qu'elle aussi me disait qu'elle allait partir, elle était donc d'accord avec moi, c'était la meilleure chose à faire, au moins, si nous allions dans des directions opposées, il ne se passera rien entre nous. Et qu'il se passe quelque chose entre nous, c'est ça que je redoute, je le redoute vraiment parce que ça n'est pas possible. Je sais bien qu'il se passe un truc entre nous, mais ce n'est pas réel, c'est comme un fantasme, un rêve qui ne se réalisera jamais. Encore une fois parce que je n'étais pas célibataire, qu'il y avait Alison et qu'elle, sûrement, ne l'était pas non plus ... Quoique je ne l'ai pas entendu me parler d'un certain copain qu'elle pourrait avoir ... A vrai dire, pourquoi elle l'aurait mentionné puisqu'il n'y a rien entre nous ? Strictement rien. Rien qui nécessite une quelconque attention ou que quelqu'un soit au courant. J'espérais qu'elle allait le garder pour elle, parce que je ne voulais pas qu'Alison l'apprenne, surtout qu'il n'y avait rien à dire, j'avais rencontré Trycia dans les bois alors que je me promenais pour être tranquille un moment ... Ce n'était que du pur hasard et il n'y avait rien à voir derrière tout ça ...
Alors que je commençais à partir, que je pensais que cette conversation était fini, elle rajouta quelque chose, quelque chose qui sonnait tellement faux de sa part, ce qui me fit froncer les sourcils, elle voulait que je salue Alison de sa part ? Je secouais la tête et au lieu de tracer ma route et de faire comme si je n'avais rien entendu, je me retournais pour lui faire face, une expression de surprise sur le visage

« Elle doit pas être au courant. »

Je baissais la tête, en l'espace de quelques secondes, je pus ressentir de la panique qui m'envahissait ... J'avais eu peur, peur de perdre Alison à cause de toute cette histoire, et ressentir ça signifiait que je l'aimais toujours, et que ce qui se passait avec Trycia n'avait aucun intérêt ... Parce que c'était Alison qui comptait à mes yeux. C'est vrai, je ne me voyais pas être avec Trycia, ça ne collait pas ... Alors qu'avec Alison, ça collait parfaitement ! Je reposais mes yeux sur Trycia après quelques minutes de silence, le temps pour moi de retrouver mes esprits, je soupirais légèrement, ne sachant pas quoi dire ...

« Ce qu'il y a entre nous, s'il y a quelque chose ... C'est ... Pas bien. »

Pas bien, comme si je m'adressais à un enfant de 10 ans qui venait de faire une bêtise ... L'étape de la bêtise n'avait pas été encore franchie pour ma part, mais j'étais à la limite et je savais que je devais reculé, et arrêter de prendre des risques, et pourtant, je ne savais pas pourquoi, mais je ne pouvais pas m'en empêcher, je ne pouvais pas, ça m'était impossible ...

« Je suis perdu ... Il y a quoi entre nous? »

Finalement, ni l'un ni l'autre n'avait le courage de partir. Ou alors était-ce de la bêtise. Dans les deux cas, il fallait bien que l'un de nous prenne une décision et tout de suite. Si nous n'avions pas le courage de partir maintenant, qui sait ce qui se passera après... Même si je sais pertinemment que la barre à ne pas franchir se rapproche dangereusement de nous de seconde en seconde. Je déteste le dire, mais c'est pourtant vrai. J'ai beau me répéter que je ne suis pas le genre de fille à trahir ses amies, le dire ne m'aide pas surtout dans ce genre de situation. J'espère que c'est tout de même ce qui me sauvera. Je n'avais pas fait deux pas que Ryan prononça quelques mots qui me firent réagir. Alison ne devait rien savoir. Bien sur qu'elle ne saurait rien. Je ne suis pas stupide au point de lui dire ce qui se passe entre son petit ami et moi. Si il se passe quelque chose... J'ai beau essayer de me prouver qu'il ne se passe rien, c'est pourtant le cas, il se passe bel et bien quelque chose sinon nous continuerions à nous chamailler comme nous avons coutume de le faire. Alors lorsqu'il dit qu'elle ne devait pas être au courant, je lui répondis sur un ton méchant, comme si le côté mesquin que j'ai en moi se réveillait de nouveau :

« Bien sur que non! »

J'avais bien envie d'ajouter « au courant de quoi ? » du fait que même nous deux, les deux personnes intéressées ne savons pas exactement de quoi il en retourne. Nous n'arrivons pas à mettre des mots sur tout « ça » alors comme l'avouer à une tierce personne ? Et surtout pas à Alison. Toujours est-il que je n'aurais pas dû m'énerver comme ça. Je ne suis pourtant pas du genre à être impulsive. Je préfère de loin réfléchir avant d'agir. Mais avec Ryan c'est différent... Il a cet effet sur moi que je ne saurais décrire par des mots précis. Toujours est-il que je n'aime pas cette partie de moi qui se réveille à chaque fois que je suis en sa présence. C'est comme si je n'y pouvais rien, comme si près de lui je n'arrivais pas à me contrôler, c'est une sensation tant horrible qu'agréable.
Et Ryan reprit la parole pour dire que ce qu'il y a entre nous n'est pas bien. J'aurais cru entendre ma mère me parlant comme si j'étais encore une enfant. Mais je ne répondis rien. Ça ne servait à rien que je réplique à ce sujet. Et ce qu'il demanda ensuite me perturba. C'est la question que je me pose depuis le début, c'est ce que j'essaye de lui faire dire depuis que je l'ai rencontré ici. Moi-même je suis bien incapable de dire ce qu'il y a entre nous si ce n'est un sentiment inexplicable tant agréable que déplaisant. Agréable puisqu'aucun de nous ne semble vouloir partir, et que sa simple présence me fait un drôle d'effet mais déplaisant du fait que ce genre de sentiment ne devrait pas être permis lorsqu'il y a une tierce personne en jeu. Ici, il y a Alison, sans oublier Lucas. Mais je ne l'ai pas mentionné puisque je ne veux pas l'inclure dans cette histoire. Alors, comme si mon naturel posé et réfléchi reprenait le dessus, je répondis calmement à Ryan :

« Il n'y a absolument rien entre nous. Nous sommes deux personnes de lycées opposés qui n'avons absolument rien en commun, si ce n'est Alison. »

C'est comme si je voulais m'en convaincre. Je voulais vraiment y croire mais prononcer ces mots ne m'aidait pas vraiment. Ryan y croira peut-être...

J'avais beau l'écouté me dire qu'il n'y avait rien entre nous, strictement rien, je n'en étais pas vraiment convaincu, elle avait sûrement aussi peur que moi ... Parce que je savais qu'avouer qu'il y avait bel et bien un truc entre nous, ça siginfiait déjà dépassé la barrière qui nous séparait encore du bien et du mal ... Passer de l'autre côté de la barrière était mal, et je le savais mais je ne pouvais pas m'empêcher de penser à ça, à ce qui pourrait se passer si justement, on allait de l'autre côté de la barrière ... Dans ce cas là, c'était mal, c'était mal parce que j'allais blessé Alison et c'était vraiment la dernière chose que je souhaitais ... Elle qui avait tout fait pour me rendre heureux, elle qui supporté mon humeur massacrante quand ça n'allait pas ... Je lui devais beaucoup de chose et surtout pas l'infidèlité ... Je hochais la tête légèrement, elle n'allait pas l'admettre, admettre qu'il y avait bien quelque chose entre nous, quelque chose qui me pesait, qui me bouffait mon énergie, ma bonne humeur ... Elle n'allait pas l'admettre et je n'allais pas le faire, on était coincés et je devais faire avec. Je fis mine d'y croire en hochant la tête légèrement, je serrais mes lèvres comme si je retenais mes paroles, ce que je pensais vraiment, je restais silencieux à la place ... Je fis quelques pas en arrière pour lui faire comprendre que la conversation qu'on venait d'avoir n'avait plus lieu d'être ... Je reposais mes yeux une dernière fois sur elle ... Comme si je mémorisais chacun de ses traits, comme si c'était la dernière fois qu'on allait se voir. Parce que je le savais au fond de moi, c'était la dernière fois qu'on se verrait et qu'on se parlerait ainsi, calmement ...

« Ouais ta raison, ya rien. Et j'ai été fou de penser qu'il y avait quelque chose ... »

Je l'avouais encore une fois qu'il y avait quelque chose entre nous, mais je n'en dirais pas plus, parce que je l'avais décidé, c'était la dernière fois que je me montrerais gentil face à elle, qu'elle ne me dise pas la vérité, qu'elle n'admette pas qu'il y avait ce truc entre nous m'enrageait légèrement ... Je baissais la tête, fermais les yeux durant quelques instants afin de retrouver mon sang froid et mes esprits, je ne comprenais même pas pourquoi j'agissais ainsi, il n'y avait pas de raison pour que j'agisses comme ça ! Mais à chaque fois que ça concernait Trycia, je ne sais pas pourquoi et comment, mais je ne pouvais pas réagir de manière enjouée ... Non, quand il s'agissait de Trycia, je devais toujours être en quelque sorte violent, du moins très désagréable ...

« Fou d'avoir penser que tu pourrais représenter plus à mes yeux ! Mais au final, si je te détestes c'est qu'il y a une raison... »

Je soupirais légèrement, je venais malencontreusement d'avouer ce que je ne voulais pas avouer depuis le début, ce qui me déstabilisait légèrement .... Je fis quelques pas en arrière, grandissant ainsi la distance qu'il y avait entre nous ... J'étais prêt à partir, à m'enfuir loin d'elle mais avant ça, je devais encore dire quelque chose ... Une chose importante

« Alison ne doit pas être au courant de cette conversation ... S'il te plait ... »

Il n'y a rien entre nous, absolument rien. Il n'y a rien entre nous, absolument rien. Mais de le répéter ne change pas les faits. Il y a bel et bien quelque chose entre nous même si on veut se prouver le contraire. Nous ne voulons pas l'avouer et est-ce que c'est une bonne chose, je ne sais pas. Toujours est-il que ne rien dire ne nous engage à rien. Ne pas le dire nous permet de nous persuader qu'il n 'y a vraiment rien. Il n'y aurait pas Alison que ce serait pareil. Et puis, il n'y a pas que Alison... Toute cette histoire est compliquée et pourtant il serait si simple d'y donner une réponse : oui ou non, il y a bel et bien quelque chose entre nous. Je déteste ça, ne pas pouvoir mettre des mots sur le quelque chose qui nous unis. Je déteste ne pas pouvoir contrôler la situation. Et comme pour m'approuver, Ryan répéta ce que je venais de dire, qu'il n'y a absolument rien entre nous. Mais la fin de sa phrase ne sembla pas convaincante. Finalement, il ne m'avait pas cru lorsque j'ai prononcé ces mots... Mais je ne répondis rien à cela. En revanche, ce qu'il dit ensuite me surpris. Je ne m'attendais pas à ce qu'il ait ce genre de réaction. Et je pouvais voir qu'il n'avait pas fait exprès de dire une telle chose. Il croit bel et bien qu'il y a quelque chose entre nous. Et il dit même qu'il me détestait. Je ne m'attendais pas non plus à une grande déclaration d'amour, surtout venant de lui mais de là à dire qu'il me déteste. Enfin bon, en y réfléchissant bien, c'est ce que je pensais de lui avant d'aller au fond des choses, ou tout du moins, avant de m'être posée des questions. Alors pour lui répondre, je lui dis :

« Effectivement, il y a une raison! Mais ça nous avancera à quoi de la dire tout haut ?!  »

Je ne sais pas pourquoi, mais d'un seul coup, j'avais changé de comportement. Mon naturel posé fichait le camp pour laisser place à la fille que Ryan connait mieux que personne : la fille qui aime se chamailler surtout avec lui, la fille que je déteste devoir jouer mais qui ne me demande pas mon avis pour se manifester. C'est étrange de dire une telle chose de soi-même, mais c'est pourtant ce qui m'arrive. Toujours est-il que j'en avais marre de chercher le pourquoi de la chose, et je ne voulais pas poser de problèmes à Alison. Je ne trahis pas mes amis et avouer ce qui me lie à Ryan serait une trahison et je ne veux surtout pas que ça arrive. Alors comme pour continuer sur ma lancée, j'ajoute sur un ton un peu plus calme :

« La raison paraît simple comme ça mais elle est bien loin de l'être au final. Alors ne rentrons pas dans les détails, Alison ne mérite pas ça... Je tiens à elle tout comme toi alors ne compliquons pas les choses plus qu'elles ne le sont déjà. »

Mon naturel posé et réfléchi refaisait surface. J'avais l'impression d'être un yoyo qui change d'humeur comme de chemises, c'est agaçant. Mais parler de tout cela ne m'aide pas à rester posée et réfléchie. Alors lorsqu'il ajouta que Alison ne devait pas être au courant de cette conversation, je lui répondis sur un ton posé :

« Bien sur qu'elle ne le sera pas. »

Je baissais la tête, cachant ma déception, déception due à cette conversation, qui avait assez bien commencé, mais qui maintenant avait tourné au cauchemar, enfin cauchemar, pas vraiment, mais ça en était proche, très proche. Dire que je la déteste était un peu gros, je ne le pensais pas du tout, en fait, je le pensais, mais seulement parce qu’elle n’était pas capable de dire à voix haute, dire à voix haute qu’il y avait quelque chose entre nous, c’est pourquoi je m’étais mis dos à elle et que j’avais fait quelques pas pour m’éloigner d’elle, j’étais décidé, c’était la dernière fois que je la verrais. Je fronçais les sourcils et me retournais vers elle en regardant autour de moi avant de reposer mes yeux sur Trycia. Je devais être certain qu’elle ne dirait rien.

« Merci. »

Je lui dis simplement ça, un simple merci pour ce qu’elle venait de dire, que Alison ne serait au courant de rien, de vraiment rien de ce qui s’est passé aujourd’hui, de ce qu’il y avait entre nous, puisqu’au final, il n’y avait rien, rien, du moins, on ne se l’était pas avoué et je pense que ça restera comme ça pour un long moment. Je relevais ma tête vers elle, la regardant d’une manière triste, c’était la dernière fois que je la voyais … Et que je lui adressais la parole, j’étais décidé d’une chose, de la voir le moins possible et d’oublier, oublier ce qu’il venait de se passer entre nous aujourd’hui, ce qui nous reliait, reprendre un nouveau départ et ne pas la compter dans ma vie …

« Il vaut mieux qu’on aille chacun de notre côté, et que la prochaine fois qu’on se croise, qu’on ne s’adresse pas la parole, même pas pour se chamailler … »

J’avais du mal à croire qu’il venait de dire une telle chose. Mais je dois bien me rendre à l’évidence, il a raison. On ne peut pas continuer à se chamailler indéfiniment en se persuadant qu’il n’y a absolument rien entre nous. C’est un fait, il y a bel et bien quelque chose entre nous. Et comme aucun de nous ne veut le prononcer à haute voix, nous n’avons plus qu’une seule option : celle qu’il a énoncé. Je déteste le fait qu’il l’ait dit, je déteste le fait qu’on ne pourra plus rien se dire, ni même pour se chamailler, je déteste cette journée. Ce qui devait être un paisible moment en forêt s’est transformé en cauchemar. Il y aurait peut-être une solution à tout cela : tout avouer. Mais je ne suis même pas certaine que ça nous mènera là où je veux aller. Et par là, j’entends ne plus se chamailler ou tout du moins le faire pour sauver les apparences et surtout ne pas faire de mal à Alison. Mais même si l’un de nous se décide à prononcer ce que nous redoutons tous les deux, la situation pourra prendre deux directions opposées : soit on s’évite, soit on continue notre petit « jeu » de chamailleries incessantes. Je ne sais pas ce que je préfèrerais. Moi qui suis d’ordinaire si franche et qui n’ai pas peur des mots, face à Ryan tout me parait compliqué. C’est étrange comme certaines personnes ont ce pouvoir là sur moi. Il en est de même avec Lucas. Mais c’est encore une autre histoire… Alors lorsque Ryan dit qu’il était préférable de ne plus se parler lorsqu’on se rencontrerait, je ne pus que répondre :

« Comme tu veux… »

Même si je ne le souhaitais pas. Depuis le début de notre rencontre en forêt, j’essayais de lui faire dire ce que je n’osais pas dire. Mais c’était peut-être à moi de prendre les devants. D’être la fille que je suis avec tout le monde. J’ai toujours prêché la vérité et je me retrouve face à une situation où la vérité n’est pas nécessairement bonne à dire. Même si les non-dits ne sont pas forcément mieux. Alors dans un ultime effort ou plutôt moment de folie, je fais face à Ryan et ajoute :

« Tu sais quoi, je vais le dire ! On ne doit pas avoir peur des mots ! » Même si c’était précisément le cas. Ou plutôt, nous avions peur de la vérité, de nos sentiments réciproques et même de le penser, je trouve cela étrange. Mais j’ai commencé et je dois aller jusqu’au bout. Je ne suis pas du genre à abandonner alors j’allais le dire… Je pris une longue inspiration pour continuer : « Ecoute bien parce que je ne pense pas être capable de le répéter… » Il faut bien dire ce qui est et donc : « Très bien… Il est possible… Enfin, c’est vrai que… Il y a quelque chose d’assez étrange entre nous, quelque chose qu’Alison et encore moins Lucas ne devront savoir… » Voilà que je mettais à parler de Lucas, Ryan n’avait pas besoin de connaître toute ma vie, pourquoi l’ai-je cité ? Il fallait que j’aille droit au but, que j’arrête de tourner autour du pot… « Il y a quelque chose comme une attirance mutuelle entre nous. » Je me gardais bien d’ajouter que cette attirance était assez forte et qu’en sa présence je n’étais pas la fille que je suis en temps normal. J’attendais une réponse de sa part, appréhendant un peu ce qu’il allait dire. Je faisais comme si ce que je venais de dire n’était pas très important, mais au fond de moi, je n’en menais tout de même pas large…

Je ne sais pas pourquoi j'ai tout sorti aujourd'hui et maintenant. Je sais pertinemment que c'est une mauvaise chose de l'avoir fait. Mais on ne peut plus reculer, ce qui est fait, est fait... Quelque part, je me déteste d'avoir dit à haute voix ce que tous les deux nous gardions enfermé en nous depuis si longtemps. Mais il fallait bien que ça sorte un jour ou l'autre, c'est certain, mais je ne sais pas, maintenant que c'est fait, j'ai l'impression de trahir les sentiments que j'ai pour Lucas. Alors que jusque là, je n'étais pas certaine de ce que je ressentais pour lui. Au moins, je suis sure maintenant. Malgré tout, je me sens mal de l'avoir fait. Pourquoi faut-il toujours que ma grande gueule me mette dans des situations plus étranges les unes que les autres. Je me suis toujours promis de tourner ma langue spet fois dans ma bouche avant de parler, mais je ne l'ai jamais fait. Il est bien plus facile de rompre cette promesse plutôt que de la tenir. Mais à l'avenir, je repenserai à aujourd'hui, et peut-être que j'y réfléchirai à deux fois avant de sortir ce que je ressens comme ça. En plus, d'ordinaire, je ne suis pas comme ça. Pourquoi me suis-je sentie obligée de m'exprimer comme ça ? C'est l'effet Ryan il faut croire. Pourquoi je n'y arrive pas en face de Lucas ? Enfin bon, maintenant, nous sommes dans de beaux draps. Lorsque la vérité était tue, les choses étaient faciles, nous pouvions continuer à nous chamailler sans nous prendre la tête avec ce qui s'en suivrait. Mais maintenant que tout est dit, ou presque, je vais y réfléchir à deux fois avant de lui adresser la parole, même pour se chamailler.
En plus, sa réponse me surpris quelque peu. Il se contenta d'un simple « d'accord » et ça me frustrait. Je ne m'attendais pas non plus à une grande déclaration, et peut-être que j'aurai réagi de la même façon à sa place. Alors je ne répondis rien à cela quand je le vis s'éloigner une fois encore. J'attendais qu'il ajoute quelque chose avant de lui dire au revoir ou tout autre chose. Puis il repris la parole pour dire que ça n'irait pas plus loin. Pour une fois, nous étions d'accord. Je me suis contentée d'un simple hochement de tête pour approuver. Je ne tenais pas non plus à ce que ça aille plus loin, pour Alison et pour Lucas. Je ne suis pas avec Lucas encore, mais vu la tournure que prennent les choses entre nous deux, je ne veux rien gâcher en continuant une chose qui n'a pas d'avenir avec Ryan. Alors nous sommes d'accord, il ne se passera rien de plus que d'habitude entre nous. Puis, il repris la parole pour dire qu'il n'en avait pas envie. Pas envie de quoi ? Que ça aille plus loin ? J'ai approuvé alors pourquoi ajouter cela ? Ou alors, il n'a pas envie de faire comme si je n'avais rien dit. Je ne sais pas... Je ne voulais pas le quitter sans que tout soit clair alors j'ai répondu : «Pas envie de quoi ? » Quelque part, j'avais envie qu'il dise qu'il voulait aller plus loin avec moi, mais même dans mes rêves les plus fous, je ne l'exprimerai pas. Et puis Alison sera toujours présente, tout comme Lucas et je vois bien plus mon futur avec Lucas. Il a toujours été celui sur qui je peux compter, dans les bons comme dans les mauvais moments. Alors j'appréhende la réponse de Ryan à ma question...