« Nan mais c'est bon, vous me saoulez tous! Vous me prenez toujours pour une débile, je suis pas conne à ce point! Faut arrêter de me prendre pour une gamine qui sait rien faire! Oh et puis merde! Allez tous vous faire foutre! »
Je pris ma voiture afin de me rendre chez moi car je n'avais qu'une envie: fumer. Ce n'étais qu'une simple crise parmi tant d'autre. Parmi trop d'autres. Mais dans ces moments là, je ne pouvais pas me contrôler. C'était plus fort que moi. Je criais et pétais des câbles avant de rentrer chez moi m'enfermer dans ma chambre, avant d'en ressortir un instant après comme si de rien n'étais, de nouveau toute joyeuse. Le calme après la tempête. Enfin d'abord fallait-il en sortir, de cette tempête. Ca n'allait pas être si simple vu que je me fis arrêter par une voiture de police.
« Vous savez à combien vous rouliez mademoiselle? »
« Bah oui, encore heureux, je suis pas complètement gaga encore, ce serait malheureux! »
« Vous vous croyez drôle? »
« Euh non, pas vraiment.. »
Et voilà comment je me suis retrouvée au poste de police. En tant normal je me contentais de m'excuser et de faire un petit sourire à l'agent pour qu'il me laisse repartir. Mais je venais de faire une crise alors j'étais encore énervée. Je roulais donc encore plus vite que d'ordinaire. Je voulais rentrer le plus rapidement possible et fumer pour me calmer. Heureusement que je n'avais rien pris sur moi, ça n'aurait fait qu'aggraver mon cas. Je devais attendre qu'on vienne me chercher. Par "on", il était évidement de c'était mon frère qui allait devoir débarquer au poste. J'étais donc assise en attendant qu'il arrive, les jambes et les bras croisés, tapotant du pied par terre. J'étais encore plus énervée d'avoir atterris ici. Je ne savais d'ailleurs pas par qu'elle miracle je n'avais pas encore fais un scandale de plus. Peut-être un moment de presque lucidité. Je ne voulais surtout pas me retrouver en cellule quelques jours. Mon frère avait certainement assez de problèmes pour que je lui en rajoute encore. Il ne voulait pas me parler de ses problèmes mais je savais qu'il en avait. Après tout, il sortait avec une de ses élèves, qui était enceinte de lui qui plus est. Ça devait vraiment pas être facile. De plus, il devait vivre et s'occuper de moi. Et ça, c'était vraiment pas facile du tout. Je me mis à soupirer et décroiser mes bras enfin de ma lever en le voyant arriver. Il parlait avec l'agent et réglait cette affaire avant de sortir sur le parking. Je le suivis sans dire un mot. Ne voulant pas trop aggraver mon cas. Bien que j'étais persuader de n'avoir fait aucun mal.

Aileen était sortie et comme à chaque fois qu'elle sortait je ne pouvais pas m'empêcher de m'inquiéter pour elle. Pas à cause de sa maladie hein .. enfin si mais pas vraiment. Je savais qu'elle adorait conduire vite, hors conduire vite entraine souvent des accidents de la route. C'est normal que je m'inquiète après tout ! C'est ma sœur et je l'aime, j'ai pas envie de la perdre ... surtout pas pour une raison aussi stupide que ça. Quand le téléphone sonna, je retins ma respiration. Voilà, les flics m'appelaient pour m'annoncer qu'elle avait été tuée en percutant un camion sur la nationale. Doucement, je m'avança près du téléphone et avec un geste d'une lenteur surréaliste je décrocha enfin. Mr York ? Oui ... Police du conté de Lima. Et voilà, ce qui lui pendait au nez depuis qu'elle avait eu son permis était arrivé ... Je déglutis. Je vous écoute ... Un agent a arrêté votre sœur pour conduite au dessus des limitations de vitesse. Pouvez vous venir la chercher s'il vous plait ? Un soupir de soulagement s'échappa de ma bouche sans que je ne puisse le contrôler. Elle était vivante et pour le moment c'était tout ce qui comptait ! Euh ... oui oui ! J'arrive tout de suite.

Ce que j'avais imaginé entre le moment où le téléphone avait sonné et où l'agent m'avait dit ce qu'il se passait réellement était cauchemardesque. J'en voulais à Aileen de me faire subir ça mais je savais que même si elle avait voulu se contrôler, ça restait dur pour elle et lui demandait beaucoup d'effort. Je conduisis donc jusqu'au poste de police en réfléchissant à ce que j'allais lui dire. Je n'aimais pas faire son père mais trop souvent j'étais amené à l'être. Elle venait de me faire vivre la plus grosse peur de ma vie. En arrivant à l'accueil j'avais déjà tout un discours dans ma tête. Z'êtes là pour la prostituée ? Hein ? Mais de quoi il me parle ce connard ? Bonjour déjà. Et non, je suis là pour ma sœur. La ptite blonde super canon ? Je commençais à en avoir marre de lui et il le savait. Oui, cette petite blonde super canon mineur là. Il ne répondit pas voyant mon impatience et me fit signer un papier avant d'aller la chercher mais je n'attendis pas et je sortis dehors. Je la savais derrière moi, c'était le moment propice pour lui sortir tout mon monologue. Hors, j'en avais oublié la moitié et j'étais incapable de me souvenir par où je devais commencer. Une petite improvisation s'imposait donc ...

T'es fière de toi j'espère. Tu te rends compte à quel point tu m'as fais flipper ? J'ai cru que t'étais morte !

J’étais postée devant mon frère, les bras croisés et le regardant. Je savais que j’allai devoir écouter un autre de ces monologues. Un autre, oui, car je n’en faisais toujours qu’à ma tête. Et la maladie n’était pas toujours une excuse assez valable. Mais il ne le fit pas. Ce qui ne m’étonnait pas tellement tout compte fait. Je savais que Gab n’aimait pas faire preuve d’autorité sur moi. De la vraie autorité je veux dire, pas comme celle d’un frère qui pourrait simplement dire à sa sœur de ne pas fumer ou de faire attention quand elle sort. Il n’aimait pas faire le papa avec moi. Et ce n’était de toute façon pas son rôle. Il devait pourtant l’endosser trop de fois. J’étais persuadée qu’un jour il finira par en avoir vraiment marre et qu’il me laissera seule. Bien qu’il n’en serait jamais capable. Mais j’avais le chic pour m’imaginer tout un tas de trucs. Et dans les moments où je m’imaginais mon frère me laissant, j’espérais qu’il sache à quel point je lui étais reconnaissante de tout ce qu’il faisait pour moi, même si je ne le montrais pas vraiment. Et j’espérais également qu’il sache à quel point il était important pour moi et à quel point je l’aimais.
« Morte ? Je sais conduire ! »
En effet, malgré le fait que je conduisais vite, j’étais une excellente conductrice. Enfin cela n’empêchait pas le fait que je puisse avoir des accidents. Mais ça je n’en étais pas vraiment consciente. Je pensais pouvoir échapper à tout. Je me sentais en sécurité dans ma voiture. J’avais confiance en elle et surtout en moi. Lorsque j’étais au volant, c’était les rares moments où j’avais vraiment confiance en moi. Je ne comprenais pas que les gens ne puissent pas comprendre ça justement. Ils ne voyaient que le côté dangereux de ma conduite. Je soupirais.
« Je vois pas ce que je fais de mal ! Pourquoi on me laisse pas faire ce que je veux ? Je dois toujours faire attention à tout, c’est épuisant à la fin ! »
De toute façon, que je fasse des efforts ou non, ça revenait toujours au même. Voilà pourquoi je n’avais pas vraiment conscience des choses. Je vivais dans mon monde. Je ne savais pas combien il pouvait y avoir de morts à cause des accidents de la routes et je n’en avais rien à faire. Je voyais une voiture sur le bas côté tous les 36 du mois. Ce qui était très peu pour moi. Et je me disais que cette personne ne savait pas conduire ou devait avoir bu. C’était donc de sa faute.

Elle ne se rendait compte de rien alors ... Quand je la voyais aussi sûre d'elle, une pensée me traversait l'esprit. Toujours la même, à chaque fois et ça me filait la chair de poule. Pour comprendre ce qu'il pouvait lui arriver il fallait que ça lui arrive. Là au moins elle se rendrait vraiment compte des choses du moins j'espère ... Oui, j'en étais rendue au point de souhaiter un accident à ma petite soeur ... Je me souviendrais toujours du jour où elle est née, quand je l'ai prise dans mes bras pour la première fois. Je n'étais très grand, j'avais seulement 7ans, mais je m'étais promis de la protéger quoi qu'il arrive. Que jamais je ne la laisserais dans la merde et que j'allais tout faire pour être un grand frère exemplaire. A cette époque j'étais loin de me douter de ce que j'allais devoir faire pour elle ... La laisser vivre chez moi, y fumer ses joints, aller la chercher chez les flics, avoir constamment peur pour elle ... Ce n'était pas facile pour moi, je voulais être un frère mais parfois j'avais l'obligation d'être un père. Bon d'accord, ça me sert d'entrainement pour mon enfant, mon vrai enfant qui va bientôt naître, mais j'aurais préféré faire sans. J'aime Aileen, plus que quiconque même. Mais j'avais envie de lui en coller une au moins une fois par mois si ce n'est plus. Elle est aveugle des dangers qu'elle encourt jour après jour et du mal qu'elle me fait. Le pire dans tout ça c'est que jamais elle pourra se rendre compte des choses à cause de sa foutue maladie. En l'entendant ce fut comme un choc électrique pour moi qui me fit me retourner vers elle.
Pourquoi ? Peut être parce qu'il y a des règles a respecté ! Tu sais conduire, c'est fabuleux ! Je me demande bien qui a pu te valider ton permit franchement ! Bon sang Aileen quand te rendras tu enfin compte des risques que tu prends ? T'es égoïste à ce point ? Tu peux pas comprendre que te perdre serait la chose la plus horrible qui puisse m'arrive ?! C'est trop dur pour toi ?
J'étais épuisé. Je savais très bien qu'essayer de la raisonner était inutile et que je perdais mon temps. Mais j'essayais encore et encore dans l'espoir qu'un jour, peut être, elle allait enfin faire des efforts. Parce que pour le moment, il n'y a que moi qui en fait, ça ne va que dans un sens. Dès que je lui demande quelque chose, il ne se passe rien et ça devenait réellement pénible à force.

« Pourquoi ? Peut être parce qu'il y a des règles a respecté ! Tu sais conduire, c'est fabuleux ! Je me demande bien qui a pu te valider ton permit franchement ! Bon sang Aileen quand te rendras tu enfin compte des risques que tu prends ? T'es égoïste à ce point ? Tu peux pas comprendre que te perdre serait la chose la plus horrible qui puisse m'arrive ?! C'est trop dur pour toi ? » Voilà, il s’énervait enfin contre moi. Certes, il y avait peut-être des règles à respecter. Peut-être qu’il y avait des risques aussi. Et surement, je devais être égoïste. C’était même certain. Mais ne me faisait-il pas confiance à ce point pour qu’il envisage toujours le pire ? Il était vrai que je n’étais pas la fille la plus prudente du monde, mais je n’avais pas besoin d’être surprotégée comme ça. Je savais m’occuper de moi malgré ce que les gens pensaient. J’étais une grande fille à présent. On avait plus besoin de faire attention à moi comme l’on pouvait le faire avec une petite fille de 10 ans. « Tu me saoules Gabriel ! J’en ai marre de toi. T’es constamment là à envisager le pire. On fait ça pour nos enfants. Quand ils sont petits ! On veut pas les laisser sortir et on s’inquiète constamment. Mais merde ! T’es pas mon père. Et je suis encore moins une gamine de 10 ans. Alors t’as pas à réagir comme ça ! » Peut-être qu’il le devait finalement. Je refusais toujours de voir les choses en face. A croire que je n’étais pas une gamine de 10 ans, mais que je me comportais comme si. Je ne voulais pas avoir un traitement de faveur vis-à-vis de ma maladie mais il fallait croire que je faisais tout pour l’avoir tout de même. Mon comportement irresponsable et totalement pas adulte. Je voulais être une adulte. Alors que je n’étais encore qu’une ado - comme tant d’autres – qui n’en faisait qu’à sa tête. En pire. Et mes petites crises d’enfant pourrie gâtée que j’étais. Oui, ça devait être ça. Je devais avoir été trop gâté. J’étais la petite fille à sa maman. La petite fille à son papa. J’avais conscience des choses. Oui, c’était assez contradictoire. Mais il m’arrivait de savoir pertinemment ce que j’étais. Comme si j’avais deux côtés. Deux personnalités. Ou peut-être était-ce encore ces idées fausses que j’avais à longueur de temps. J’avais mon opinion sur pratiquement tout. 99% du temps, mes opinions étaient totalement à l’ouest de la réalité.

Peut être qu'elle avait raison après tout. Je la surprotégeais trop, comme si c'était ma fille hors ce n'était pas le cas. En tant que frère, mon rôle était d'être présent dans le besoin, de faire de sa vie un enfer et de la protéger un peu mais de trop ... Là, je réagis comme notre père devrait le faire. Le problème c'est qu'il ne faisait pas attention alors, je me sentais obliger. Il parait qu'on apprend de nos erreurs. Si je n'étais pas là tout le temps pour aller la chercher au poste ou je ne sais où, elle arrêterai peut être. Quoique je ne parierais pas là dessus. Tout ce que je voulais c'était qu'elle réussisse dans la vie, qu'elle arrête ses conneries et prenne enfin sa vie en main. Je suis fatigué de toujours m'inquiéter pour elle et si elle n'arrêtait pas tout ça alors je le ferais. Tu sais quoi ? Fais comme tu veux. Si t'as envie de mourir vas y ! Moi, je laisse tomber. Je fis demi tour sans attendre et commença à marcher vers la voiture, clef en main. Si elle voulait jouer, qu'elle le fasse mais qu'elle ne compte plus sur moi pour la sortir la tête du sable. A partir de maintenant j'allais devoir prendre sur moi. Ça ne me faisait pas plaisir de prendre soin d'elle de cette façon mais elle ne le comprenait pas. Je voulais être un frère sans responsabilité, qui invite une fois de temps en temps sa sœur à boire un verre histoire de prendre des nouvelles. Je ne m'attendais pas à ce qu'elle me rattrape et s'excuse. Elle était capable de le faire mais Aileen ne pensait pas avoir mal fait alors pourquoi s'excuser ?

« Tu sais quoi ? Fais comme tu veux. Si t'as envie de mourir vas y ! Moi, je laisse tomber. » Mourir, mourir, il n’avait que ce mot là à la bouche ou quoi ? J’allais finir par croire qu’il voulait réellement que je me retrouve au fin fond d’un cercueil. Ou peut-être qu’il avait simplement peur. Je me butais à dire qu’il réagissait mal – ce dont je restais persuadée – mais c’était mon grand frère. Il était normal qu’il envisage le pire et s’inquiète pour un rien. Enfin je crois. Il commençait à partir en direction de sa voiture. Je baissais la tête et soupirais. Puis allais le rattraper « Gabriel.. Excuse-moi, mon comportement était stupide. Du fait que je soit arriver au poste jusqu’à maintenant.. Je suis désolée. » Je m’étais rendue compte que je l’avais vraiment énervé. Qu’il commençait à saturer. Je ne lui rendais vraiment pas la vie facile. Et je ne voulais pas qu’il me jette ou bien qu’il ne m’aime plus. Oui je sais bien qu’un frère aimera toujours sa sœur, mais j’étais réellement persuadée qu’un jour, je l’exaspèrerai tellement qu’il ne voudrait plus jamais m’adresser la parole. Même si cela n’arrivera jamais, j’avais réellement peur de ça. Gabriel était la seule personne présente pour moi. La seule personne qui comptait.